Dans le cadre des journées Chaillot Augmenté x Rencontre TMNlab, Chrystèle Bazin propose une série de podcasts donnant la parole à des personnalités engagées dans l’innovation artistique et technologique. Dans cet épisode capté à Chaillot – Théâtre National de la Danse, elle s’entretient avec Nicolas Rosette, président fondateur de Nicoro-San et ex-coordinateur du programme Chimères, piloté par le ministère de la Culture. Une conversation passionnante sur la mutualisation dans le spectacle vivant, les environnements numériques et l’avenir des communs technologiques.
Animé et monté par Chrystèle Bazin, autrice sonore et journaliste
Enregistré lors de la rencontre TMNlab co-organisée avec Chaillot – Théâtre National de la Danse, vendredi 14 février 2025
Musique : extrait vidéo Scènes Augmentées
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Les prochaines journées Chaillot Augmenté x Rencontre TMNlab Art vivant et environnements numériques auront lieu les 4 et 5 mai 2026 [inscrivez-vous pour être informé en priorité]

Mutualiser autrement : ce que nous apprend le programme Chimères
Quels outils, quels savoirs et quelles méthodes peuvent être mis en commun quand il s’agit de création artistique hybride intégrant les technologies ? À travers le programme Chimères, conduit entre 2018 et 2023, Nicolas Rosette et son équipe ont posé les bases d’une réflexion structurante sur la mutualisation dans les arts vivants augmentés.
Des objets… mais surtout des compétences
« Quand on parle de mutualisation dans le numérique, on pense d’abord aux objets : ordinateurs, casques VR… Mais très vite, on comprend que ce n’est pas le cœur du sujet », explique Nicolas Rosette. Le programme Chimères, mené conjointement par le Lieu Unique (Nantes) et le TNG (Lyon), a accompagné des créations artistiques intégrant des technologies complexes, révélant l’importance cruciale de la mise en commun… des savoir-faire.
L’un des piliers de Chimères a été d’identifier et de soutenir des « personnes ressources », capables d’accompagner les artistes sur des enjeux technologiques tout en parlant le langage du plateau. « Ces médiateurs, souvent issus eux-mêmes du monde artistique ou de la tech, devenaient des catalyseurs d’acculturation entre deux cultures professionnelles très différentes », souligne-t-il.
La ressourcerie, ou l’utopie concrète
En parallèle des projets artistiques, le programme a permis de réfléchir à la notion de ressourcerie technologique. « L’idée n’est pas de créer une licorne, mais une chimère : une coopérative d’outils technologiques, adaptée aux besoins du spectacle vivant. » Ce modèle, encore à construire, viserait à mutualiser les développements logiciels spécifiques à certains projets pour en faire profiter d’autres artistes — à condition que chacun contribue à son tour.
Mais cette ambition se heurte à des obstacles juridiques, politiques et économiques. « On touche à des enjeux de propriété intellectuelle, de gouvernance collective, de modèle économique… », indique Nicolas Rosette. La question de l’open source, par exemple, reste ouverte : « Il faut protéger les contributeurs sans verrouiller l’accès, c’est un équilibre délicat. »
Une communauté à inventer
Au-delà des outils, c’est toute une communauté professionnelle qui s’est esquissée à travers Chimères. « C’était un cycle de recherche de cinq ans, un peu comme un projet ANR. On a pris des murs, cassé du matériel, fait des erreurs — pour que d’autres n’aient pas à les refaire. »
Cette transmission informelle, presque artisanale, rappelle les logiques de compagnonnage dans les métiers du spectacle. « Aujourd’hui, il faut penser la mutualisation comme une dynamique vivante : ce sont les réseaux humains, les expériences partagées, les récits de terrain qui font levier. »
Et demain ?
Si le programme Chimères est terminé, ses résonances se prolongent via « Scènes Augmentées » et le dispositif « Onboarding Pass », dans une perspective d’accompagnement spécialisé des équipes artistiques. Mais la question reste posée : qui portera demain l’ambition d’une coopérative logicielle pour le spectacle vivant ?
« Peut-être que cette communauté doit se structurer elle-même, avec le soutien de la puissance publique pour les fonctions de coordination », propose Nicolas Rosette. Il reste optimiste : « Les outils les plus performants du numérique sont issus de l’open source. L’utopie de la mutualisation, c’est une utopie concrète. »
Cet article a été rédigé avec l’appui de l’IAgen, d’après la retranscription textuelle du podcast.

Explorez les contenus produits lors des journées Chaillot Augmenté x Rencontre TMNlab : Art vivant et environnements numériques les 13 et 14 février 2025 : tous les podcasts [écouter], toutes les tables-rondes [écouter], les présentations de l’espace démo [découvrir] !
Cet événement s’est tenu le cadre du Sommet pour l’action sur l’IA.
