Le Saunamaton : “Au T2G, on teste beaucoup, on veut provoquer des expériences et les partager”

Installé dans l’espace d’accueil du Théâtre de Gennevilliers, le « saunamaton » avait pour objectif de recueillir les impressions du public à l’issue des représentations et de créer une interaction supplémentaire entre les artistes, le théâtre et ses spectateurs. Mais trois ans plus tard, qu’en est-il de son utilisation ? Les spectateurs du T2G se sont-ils appropriés cet outil numérique ? Réponses avec Stéphanie Dufour, chargée des relations publiques et de la communication.

Par Rossana Di Vincenzo

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Quel bilan tirez-vous du saunamaton installé depuis 2013 dans l’espace d’accueil du Théâtre de Gennevilliers ?

Le bilan va être rapide, car malheureusement on constate que ça ne fonctionne pas. D’ailleurs, depuis la rentrée, nous avons changé le système de fonctionnement du saunamaton. De la vidéo nous sommes passés aux podcasts. À l’intérieur de la cabine, un iPad avec un logiciel de prise de son est mis à disposition des gens qui souhaitent laisser un commentaire. Le « son » est ensuite mis en ligne sur notre compte SoundCloud mais les vidéos qui ont été faites auparavant sont toujours disponibles sur notre site. Quand on a des spectacles jeune public, des visites du théâtre ou des scolaires dans la salle ça fonctionne, mais j’ai l’impression que ça dépend vraiment des spectacles programmés. Il y a des spectacles pour lesquels les gens sont plus à l’aise de parler à chaud ou ont envie de partager leurs réactions, et d’autres dans notre programmation qui sont peut être plus compliqués, où les gens n’ont pas forcément envie de réagir sur le moment et en tous cas pas sous cette forme-là.

L’objet en lui-même est-il remis en question ?

Je pense que c’est un outil qui est très bien mais qui doit encore s’adapter. C’est pour cela qu’on continue et qu’on ne l’a pas enlevé de l’espace d’accueil. On continue à miser sur cet objet-là. On pense qu’il faut du temps pour installer des choses et que c’est vraiment lié à la programmation et à la façon dont c’est amené. Pour l’instant nous n’avons eu qu’un seul commentaire sur l’iPad pour La Clausura del Amor de Pascal Rambert, aucun sur Prova – la version italienne de Répétitions -, et sur les deux spectacles en japonais de Yudaï Kamisato et Toshiki Okada qu’on accueillis en septembre et octobre. C’est un peu frustrant.

En passant au podcast, y a-t-il une personne qui s’occupe de dérusher et de monter les enregistrements au T2G ? Ou sont-ils laissés tels quels sur le site ?

Non, les enregistrements sont laissés tels quels et d’ailleurs, à l’époque, on avait même mis en ligne des vidéos de spectateurs qui n’étaient pas satisfaits par ce qu’ils avaient vu. À partir du moment où il n’y a pas de commentaires dégradants ou méchants à l’encontre des artistes, on poste ce qu’on a. Mais, de manière générale, les gens s’enregistrent pour laisser des commentaires positifs ; quand c’est de la critique négative, ils ne prennent pas la peine de s’enregistrer.

Y a-t-il une signalétique ou un action RP mise en place pour inciter les spectateurs à utiliser le saunamaton ?

Le saunamaton est situé dans le hall d’accueil, on ne peut pas le rater. C’est vraiment un sauna, une cabine en bois à l’intérieur de laquelle il y a un iPad. Il y a une guirlande lumineuse qui indique que c’est un élément a priori « spectaculaire » dans lequel il peut se passer quelque chose. Nos ouvreurs informent également les spectateurs de l’existence de cet objet. Il est signalé sur tous nos guides de salle, avec les réseaux sociaux. Il y a un « pic-signe » qui est posé sur la table de la librairie, juste à côté du Saunamaton, qui explique cet objet et son mode d’utilisation.

C’est une déception ? L’échec de la vidéo ? Vous pensiez que les gens allaient s’en emparer ?

Au T2G, on teste beaucoup de choses depuis des années, c’est ce qui nous intéresse aussi. Provoquer des expériences et les partager. Donc, évidemment, quand elles sont partagées par le plus grand nombre on est plus heureux que quand ça touche trois personnes. Mais on a vite vu que la vidéo était un frein. On a laissé faire en se disant qu’à terme, avec certains spectateurs réguliers, ça finirait par prendre. Donc on a attendu. Cette année, avec le changement de direction à partir de janvier (Daniel Jeanneteau remplacera Pascal Rambert à la direction début 2017 NDLR), on s’est dit qu’on allait essayer la critique audio, pour lever le frein de l’image. Selon moi, ça demande plus de médiation, il faudrait dédier une personne pour essayer de guider le spectateur vers cet objet-là, on en a parlé mais ça ne s’est pas fait pour l’instant. On ne veut pas contraindre les gens non plus, il faut que ça soit spontané, qu’il y ait un désir réel de partager quelque chose. Mais on n’est pas déçus, on est contents que ça existe, de ce que les gens ont accepté de partager avec nous. Depuis sa création, nous avons eu trente deux vidéos relayées sur la page Dailymotion du saunamaton, puis sur Facebook. On va continuer cette réflexion.

La vidéo dans le cadre du saunamaton n’a pas fonctionné auprès des spectateurs, avez-vous pour autant repensé son usage dans son ensemble dans le cadre de la communication du T2G ?

L’usage de la vidéo chez nous se fait à plusieurs niveaux. Quand il s’agit d’un spectacle, on poste des teasers, des bandes annonces officielles en accord avec les équipes artistiques – on a assez peu de vidéos produites par des services RP. Pour le saunamaton, il s’agissait de vidéos de spectateurs, donc libre à eux d’accepter et de signer la décharge d’utilisation de l’image, c’est peut être ça qui en a rebuté certains. Je ne pense pas qu’il faille repenser entièrement notre stratégie, au contraire le saunamaton est lié à d’autres choses qu’on a développées en terme d’image. C’est aussi une question de moyens, on ne peut pas s’improviser monteur, il faut avoir les logiciels, la technique, au-delà de la ligne éditoriale qu’on souhaite développer ici, il faut aussi avoir les bons outils et les moyens de les développer. On travaille un peu avec les moyens du bord et forcément à un moment, on est limité. Au-delà des outils, il y a aussi la charge de travail que cela implique. La vidéo fait partie, dans une certaine mesure, de notre stratégie et des actions qui sont mises en place sur la communication globale du lieu, mais on ne peut pas y consacrer plus de temps pour l’instant. Mais on ne va pas l’abandonner, les rapports sur les données numériques montrent bien que l’usage de la vidéo est de plus en plus courante maintenant, il s’agit de réfléchir sur la façon de l’utiliser.

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